Le premier album d'Emily Jane White, l'excellent "Dark Undercoat", nous avait permis de découvrir la jeune femme: visiblement torturée, dotée d'une belle voix (à la Cat Power, diront certains, non sans raison) et d'un talent certain pour mettre ses tourments en chanson. Ce premier opus était très folk, à peine teinté de rock, et noir, très noir. Qu'attendre de ce deuxième disque? Elle aurait pu facilement aligner à nouveau 12 petites perles folk. Puis un autre album, et encore, encore un... tout pareil. Non pas que ça serait sans intérêt! Mais elle cherche à apporter une petite touche supplémentaire, c'est très visible: un effort dans le chant (qui va même jusqu'à la faire plus ressembler à Alela Diane qu'à Shan Marshall, cf. "Stairs"), des cordes bien léchées (sur tous les titres ou presque), ici une touche de slide discrète et countrysante ("the country life"). Elle ne veut pas nous en mettre plein la vue, les chansons restent toutes globalement très brutes: à peine un coup d'eyeliner dessus, et ça suffit pour attirer le chalant! Les refrains restent facilement dans la tête (surtout celui de "Stairs", chanson à tiroir qui oscille entre le folk épuré et des velléités d'arrangements plus notables). On notera aussi "Frozen Heart", au piano en écho lointain du "Metal Heart" de Cat Power (encore elle, malgré tout!), qu'on imaginerait facilement parée d'arrangements grandioses, façon Joni Mitchell (période "Both Sides now"): la prochaine mue d'Emily? Elle a le temps pour ça, mais j'aimerai l'entendre s'y frotter... Elle a le talent et la voix pour ça. Et on notera un "Red dress", seul titre véritablement rock, dont l'intonation n'est pas sans rappeler son "Hole in the middle".
Et même quand le naturel revient au galop, comme dans la très folk "A Shot Rang out", on ne s'ennuie jamais avec Emily: et pourtant ça arrive parfois dans ce genre musical, comme par exemple avec les récents Scary Mansion ou la déjà plus lointaine Kathryn Williams (malgré des belles voix et un songwriting intéressant).
De "Victorian America", je retiendrai que c'est un album de saison: ses belles cordes automnales soufflent comme un coup de vent frais dans des feuilles éparses, et la voix d'Emily est le pâle soleil de l'été indien qui nous réchauffe malgré la saison avancée. |
