Recherche

 
 
Josh T Pearson - Last of the Country Gentlemen
 
The Drums - Summertime
 
Pegase - Another World
 
Nico Yaryan - What A Tease
 
Phoenix - Wolfgang Amadeus Phoenix
 

T-Rex - Born to Boogie

 
 
Shivaree + Ginger Ale (Marseille)
 

par Harry (14/10/02)

 
Extrait en musique

 

 
Article par I-Muzzik

 

Si les deux albums de Shivaree sont devenus vos disques de chevet de ces dernières années, s’ils sont les albums que vous amèneriez sur une île déserte, évitez de vous rendre aux concerts du groupe. Ne pas voir Shivaree sur scène est encore la meilleure façon de trouver leurs albums hors du commun. Même la beauté physique d’Ambrosia passait au second plan, totalement effacée par l’éclat de sa voix et des mélodies retravaillées pour la tournée et rendues plus organiques.
J’avais tout entendu sur Shivaree. Que leurs concerts sont trop softs devenant par la même des spectacles trop respectueux de la matière sonore pour être réellement foudroyant (cf. le concert diffusé sur Canal +, où le groupe demeure trop statique et semble quelque peu s’ennuyer), que les albums sont un peu hautains, et même qu’Ambrosia chante parfois comme une Vanessa Paradis mature. Je peux vous dire que sur scène ce n’était pas Vanessa Paradis. A cela, on peut aussi ajouter qu’Ambrosia n’a rien de la femme fatale hautaine qu’elle paraît parfois. Lorsque le groupe se lâche, on est plus proche d’un chaos maîtrisé que d’un calme plat, d’un grouillement d’énergie et de sensations que d’un art mort uniquement destiné aux musées contemporains.
Parfaitement professionnelle, accompagnée par Duke McVinnie (guitare) et Danny McGoud (claviers), Ambrosia Parsley est une sirène accessible oscillant sans cesse entre classe distante et intimité sincère. Lorsqu’elle raconte une histoire à dormir debout et fait monter un membre du public sur scène pour traduire en toute simplicité, Ambrosia fait preuve d’un enthousiasme désarmant comme si c’était la première fois, la seule fois. De plus sa voix totalement aérienne, organe acrobate et protéiforme qui se permet une multitude de facéties, se révèle plus chaude et vivante sur scène que sur disque. Ce n’est pas peu dire. Entre une Ambrosia vêtue d’un tee-shirt vert et d’un pantalon noir et son groupe composé d’un batteur métronomique, d’un clavier psychédélique et par moments déjanté, d’un bassiste discret bien que performant et d’un guitariste perpétuellement assis sur sa chaise comme un bluesman trop vieux pour demeurer debout, passe un courant immédiat et sympathique.
Une fois le décor posé, il ne nous reste plus qu’à écouter ce défilement de perles magistrales essentiellement axé sur le dernier disque « Rough dreams ». Parfois tendres (« After the prince and the showgirl » et « Stealing home »), parfois bizarres (« All because you told me so » ou « Snake eyes), d’autrefois chaotiques et terriblement rock’n’roll (« Thundercats »), les chansons de Shivaree sont des étoiles filantes, brèves qui éclairent la nuit d’un magnifique éclat. Mais plus que cela encore, avec des titres comme « John, 2/14 » où Ambrosia semble plus proche de la féline que de la femme ou encore « Flycatcher », un duo qui pourrait devenir mythique, grande chanson désaxée qui offre son lot de frisson et décroche la lune avec facilité, Shivaree frappe un grand coup et laisse une grande partie de la concurrence à des années lumières. Au-delà de la simple beauté artistique du show, de la perfection des arrangements, règne une grandeur charnelle, une ampleur telle que ce concert restera gravé dans un coin de notre mémoire pour très longtemps. Avec Shivaree, on chavire d’un bout à l’autre sans aucun complexe, ni aucune retenue.
La majorité des titres du dernier opus plus quelques titres du disque précédent (dont le fameux « Goodnight moon ») occuperont l’espace sonore avec délicatesse et offriront au public de l’Espace julien une soirée de rêve. Un public qu’on n’avait pas vu autant apte à fusionner depuis des mois.
Après un concert d’un durée raisonnable agrémenté de trois rappels, on se demandait si poser quelques jours de congés pour suivre leur tournée au quotidien ne serait pas la façon la plus adéquate pour passer un bel automne, ivre de bonheur.


Bien souvent, la première partie d’un concert occupe l’espace, fait passer le temps dans l’attente de l’arrivée sur scène de la tête d’affiche. Ainsi, ces groupes présentés comme « secondaires », sont observés d’un œil distrait, quelquefois dédaigneux, dans une ambiance ennuyeuse et vidée de son sens du spectacle, chaque chanson se terminant par quelques applaudissements polis mais pas toujours sincères. Le public indie, moins curieux qu’il le prétend, a aussi ses critères de références, ses passions starifiées et stratifiées. S’il ne s’agit pas de Garou ou de Céline Dion, il s’agit de Miossec ou de Shivaree. C’est aussi pour cela que le concert de Ginger ale démarrait lentement sans véritable conviction de la part du public malgré les efforts du groupe. Le pire c’est que souvent le public a raison, car que ce soit pour des raisons techniques (sons volontairement mauvais pour laisser la tête d’affiche demeurer l’unique star de la soirée) ou purement artistique (groupe immature et pas encore prêt à enivrer la salle), les premières parties demeurent, la plupart du temps, mineures et peu enthousiasmantes.
D’où l’intérêt que l’on porte à celle qui au défie des lois de la nature, parviennent à tirer leur épingle du jeu et à, au fil des morceaux, conquérir un public non acquis en déversant leur mélodies, leur jeunesse et leurs envies dans une salle pas vraiment combe. C’est ce que Ginger ale est parvenu à faire en première partie de Shivaree, ce soir-là, à l’Espace Julien de Marseille.
Avec leur électro-rock plutôt commun sur lequel il appose une griffe particulière le duo (ils étaient en fait cinq sur scène) Ginger ale parvint à secouer le petit monde présent, pourtant réputé indocile et froid, pour nous offrir un concert extrêmement réussi. Et si tout n’était pas parfait (on aurait aimé les entendre avec le son de Shivaree, groupe pour lequel nous étions venu), si quelques maladresses attachantes rendaient le set totalement humain, Ginger ale fut sans aucun doute la révélation de la soireé. En quelques titres tendus ou tendres, se situant entre un Morcheeba rock, un Lali puna énergique ou encore un Rinocerose naïf, Ginger ale parvenait à créer un échange avec le public venu pour Ambrosia. Pour cela et pour la percussion et la séduction des titres entendus, on déclarera sans peur de se tromper, que Ginger ale est un groupe en devenir, de possibles prochaines vedettes de la scène indie-pop Française. Comme quoi, une rencontre fortuite peut se révéler grandement enrichissante.
Ginger ale mérite de percer. En tout cas nous allons les suivre d’un œil attentif plutôt que distrait.