Recherche

 
 
Sonic youth - Simon Werner a Disparu
 
Pegase - Another World
 
Phoenix - Wolfgang Amadeus Phoenix
 
Jori Hulkkonen - Man From Earth
 
Tiefschwarz - Chocolate
 

Alain Bashung - Confessions Publiques

 
 
Albin de la Simone
 

par Pierre Derensy (10/06/05)

 
Extrait en musique

 

 
Article par I-Muzzik

 

Albin de la Simone serait il un autre homme ? Certes avec ce nouvel album il a mis de l’eau dans son vin, tel un serpent urbain il a métamorphosé sa peau d’organiste et s’est mué en chanteur qui s’assume, passant de vedette américaine à artiste confirmé. Alors lui est peut être différent s’il l’affirme, mais son univers est toujours le même. Mélange d’absurde, de sordide mais aussi d’amour et de plaisir. On aime Albin comme le kiwi au roquefort papillon, chrysalide d’où sort un garçon toujours aussi charmant.

T’arrive t’il de penser avec horreur aux shorts en coton que t’obligeait à porter ta mère quand tu étais petit ?
Albin de la Simone : «J’ai un souvenir plus douleur que ça encore, c’est un short tyrolien en cuir avec des bretelles…. Ça c’est un très gros souvenir.»

La nostalgie est elle un moteur d’inspiration ?
Albin de la Simone : «Pas du tout. Au contraire je ne suis vraiment pas nostalgique de mon enfance ou de mon adolescence. Ces périodes de ma vie se sont plutôt mal passées, je n’en garde pas des souvenirs confortables. Au contraire plus ça va, mieux ça va (rire). Cela ne m’éclate pas de parler de tout ça, je ne le fais pas pour le fun. Pour moi ces moments ne sont que des bases, des instants où tout s’est noué et que j’essaye de libérer maintenant.»

« Non Merci » c’est la chanson du souvenir inoubliable des sorties en boite de province… alors Albin de la Simon était plutôt bête de piste ou garçon blessé au bar ?
Albin de la Simone : «Un garçon blessé au bar ! la formulation est jolie. Au bar ou sur une chaise bref tout endroit prévu pour s’asseoir et où l’on peut ne pas me déranger pour me demander d’aller danser.»

Est ce que ton obsession discographique à vouloir écrire sur le roulement de pelle ou de patin est relatif à une frustration personnelle d’avec cette époque ?
Albin de la Simone : « Peut être (rire). C’est vrai que c’est un évènement la première fois qu’on roule une pelle à quelqu’un. J’aime vraiment bien l’expression. Rouler une pelle ou un patin c’est même marrant, voir mignon. Je me disais qu’il y avait un moyen d’en parler dans un contexte pas du tout rigolo ou trivial mais au contraire dans une situation très sérieuse. Je me suis escrimé à trouver la manière d’en faire un sujet réfléchi. »

Peut être est ce comme le dit Murat que le French-Kiss est la seule chose que la France va léguer à l’humanité ?
Albin de la Simone : «Et les frites ! Enfin disons avant que Bush ne demande d’appeler ça Liberty-Fries.»

Devenir chanteur plutôt qu’organiste c’était aussi pour attirer les filles ?
Albin de la Simone : «(Réflexion) Peut être… »

Quoi qu’il en soit tu es plus exposé depuis que ton nom n’est plus attaché à un artiste mais où tu es l’artiste même ?
Albin de la Simone : «Une partie de moi avait vraiment envie d’être plus exposé et donc de plaire aux filles (rire) mais l’autre partie s’en fout et va te dire que je m’en moque, que cela ne sert à rien et que ce n’est pas pour ça que je fais ce métier. C’est un mélange des deux. Bien sur c’est agréable d’avoir des fans. Je peux appeler certaines personnes de cette manière par exemple. Cela fait plaisir de voir que des gens suivent intensément ce que l’on fait. C’est très flatteur de voir que quelque chose tourne autour de vous. En même temps c’est un peu compliqué à gérer et ce n’est pas là dessus que je dois m’appuyer. C’est plutôt dans mon cas une ornementation de ma vie plus qu’un truc central.»

Faut il être un peu masochiste pour livrer ses propres compositions ?
Albin de la Simone : «Ce métier est contre-nature pour moi. C’est l’inverse de ce que j’ai toujours appris à être. Je dois me faire violence. Je pense qu’au fond j’ai la nature pour mais dans ma culture ce n’est pas si évident car je dois lutter pour pouvoir être chanteur. C’est plus classe d’être dans l’ombre. Là je suis en train de faire l’inverse. En même temps j’aimerais ne pas être la représentation du mec masochiste qui donne l’impression d’être désolé d’être là.»

Est ce que l’inspiration de « J’ai Changé » vient de Flantre votre groupe improvisé avec Mattieu Boogaerts, Gérôme Goldet et F.Moreau ?
Albin de la Simone : « Avec Flantre il nous arrive de jouer pour la fête d’un pote, bref dans des endroits pas normaux avec des musiciens qui viennent s’ajouter au groupe initial, cette chanson vient d’une mélodie de guitare que jouait Pascal Colomb, que Matthieu Boogaerts a reprise en chantant le même soir tandis que Pascalou l’ enregistrait comme annonce de répondeur. Donc à chaque fois que j’appelais Pascalou j’entendais Matthieu qui chantait ‘TuPouPaToutPoPon’ cela a fini par me rentrer dans la tête et j’en ai fait une chanson sans trop m’en rendre compte. L’histoire est un peu compliquée mais elle est au moins vraie (rire).»

Ce qui a profondément changé sur ce disque c’est l’utilisation de la guitare ?
Albin de la Simone : « J’ai composé la plupart des chansons à la guitare mais je suis vraiment mauvais guitariste car je n’arrive à m’occuper que de deux cordes pour jouer, si je passe à trois il y en a une avec laquelle je n’arriverais jamais à deviner ce qu’elle va jouer. J’ai à peu près le contrôle jusqu’à 2. Je compose mes morceaux comme ça. 8 chansons ont été traitées de cette manière. Dans l’arrangement cet instrument était donc obligatoire. Cela m’a fait bouger pas mal et m’a amené ailleurs qu’en terrain balisé.»

Peut être aussi as tu des textes plus nets ?
Albin de la Simone : «Hé bien tant mieux ! C’est en tout cas ce que j’ai essayé de faire. J’avais envie que cela soit moins flou, moins ouvert, peut être plus précis… bhen merci pour cette analyse ! (rire)»

Sur « Notre Homme » tu t’attaques à un sujet grave et brûlant qui est l’inceste, as tu hésité à la chanter ?
Albin de la Simone : «J’hésite encore à l’avoir mise. C’est délicat. Ce n’était pas très réfléchi. Je voulais l’écrire, elle me plaisait donc je l’ai mise sur le disque mais maintenant je me rend compte que c’est un truc qui secoue pas mal de gens. Pas forcément positivement car l’on n’a pas envie de parler de ça. Même si je restais elliptique ceux qui ont compris n’ont pas forcément toujours envie de l’entendre. Je sais qu’il y en a qui la saute ou qui regrave le CD sans cette chanson. Je ne sais plus si maintenant j’assumerais de la mettre. J’ai eu naturellement besoin de la faire. Même si c’est aussi de la musique et qu’il n’y a pas que l’histoire qu’elle soulève. Elle remue des choses plus négatives que je ne pensait.»

Ta conception de la réalisation avec « Je vais changer » a modifié ton fusil d’épaule ?
Albin de la Simone : «Le premier disque je l’avais étalé sur 2 ans, tout seul dans des petits studios, je bossais en tournée quand je jouait pour les autres, pour finir au Ferber avec des musiciens et Bruno Letang cela s’était fait couche par couche. Alors que celui ci je l’ai écrit en deux fois une semaine et il s’est enregistré en deux semaines deux mois plus tard. Donc tout était très ramassé. A partir de maquettes que j’avais préparées et avec au minimum 4 musiciens je me retrouvais devant un travail non plus de longue haleine mais sur un projet intense de groupe. Au résultat c’est un peu différent mais à vivre c’est un monde ! Cela m’a permis de bouleverser pas mal de choses qui sont un peu figées en moi par l’expérience. A force de toujours fonctionner de la même manière j’avais envie de provoquer des changements même s’ils ne sont pas violents à l’écoute.»

La peur du second album t’as t’elle tenaillée au corps ?
Albin de la Simone : « Pas du tout ! du coups j’ai très peur du troisième (rire). J’ai eu peur l’été dernier car tout ce que j’avais écrit jusque là était pourri et qu’il n’y avait rien à garder. Je me suis fait une vraie angoisse et puis j’avais énormément de boulot en tant que musicien, je travaillais sur plein de disques en même temps. Alors j’ai décidé de partir une semaine dans un endroit relax pour écrire et en fait je devais sûrement être très chaud, surentraîné à ce moment là en fait et tout est parti assez facilement. Je crois que le deuxième est difficile si le premier est un succès commercial. Ca doit foutre une pression colossale. Le mien n’a pas marché énormément, il a existé mais on ne peut pas parler de réussite.»

Il a eu un très beau retour critique pourtant ?
Albin de la Simone : «Oui mais quand on a un très beau retour critique et peu de retour vente on se dit qu’il y a quelque chose qui déconne quand même. Cela ne mystifie pas le disque. Il n’a pas un pouvoir surnaturel car il a beau être chouette il ne s’est pas vendu beaucoup et reste à taille humaine. Du coup cela te permet d’avoir encore plein d’envies possibles et réalisables. Il n’est pas enfermant. C’est un succès qui donne envie de plus. Alors qu’un succès à la Vincent Delerm doit être très difficile à gérer. J’imagine que moi si je vendais 400 000 disques du premier je deviendrais fou.»

Tu fais 2 reprises sur l’album, la première « Ces mots stupides » qui était sûrement un moyen de te prendre pour Robbie Williams ou Sacha Distel ?
Albin de la Simone : «Tu ne dis pas Sinatra ?»

Je ne voulais pas aller trop haut tout de suite pour te faire peur ?
Albin de la Simone : « C’était un moyen de se faire plaisir… Franchement pour moi c’est l’une des plus belles chansons du monde. Le fait de la chanter avec Jeanne à deux voix, de cette manière, avec ce côté sensuel agréable : c’est un pur plaisir. Si on s’est mis à la chanter ensemble c’est qu’on l’adorait et qu’on la fredonnait tout le temps. Chaque fois qu’elle faisait un concert je montais sur scène pour la chanter et inversement. Donc on a fini par l’enregistrer… Elle est arrivée simplement sur le disque parce qu’elle est ultra-légere, ultra-simple et très belle. C’est un vrai bonbon rose, je ne suis pas certain de pouvoir écrire ce genre de chose mais pourtant quel pied d’avoir cela sur un disque ! C’était vraiment l’invitation d’une chanson que je n’arriverais pas à faire mais dont j’ai besoin.»

Ce titre me fait penser que tu as un côté crooner qui ne s’est pas encore manifesté ?
Albin de la Simone : «C’est marrant j’écoute beaucoup Sinatra ou Harry Connick Junior. Je peux aimer ça mais quand même il y a un niveau de chant qui ne m’est pas accessible. (rire) Je sens que c’est le genre de truc qui me fout la trouille mais qui m’attire aussi.»

Comment Jeanne a t’elle pris ton « Douze fois par An » à toi qui s’intitule « Tu ne Peux Rien Faire » ?
Albin de la Simone : «Très bien. Jeanne à parlé de la femme d’une manière très fine et pourtant très crue. Je suis toujours très sensible à ce genre de ton. Dans ma chanson je ne désirais pas uniquement faire un mec qui parle mais aussi une nana pour un couple en général. Comment me placer dans la peau d’une fille ? L’idée pour moi était évidemment de lui faire un clin d’œil dans le couplet où je parle des règles. De manière à me placer dans l’autre camp… « Camp » n’est peut être pas le bon terme car en même temps ce n’est pas de la guerre (rire). Disons dans l’autre position (rire).»

Sur l’autre reprise, tu t’attaques à la chanson réaliste qui rien qu’à lire le texte donne envie de pleurer ?
Albin de la Simone : «Je ne suis pas fan de Piaf. Je suis pas très sensible à sa façon de chanter et à ce qu’elle chante mais on m’avait proposé de participer à une nuit blanche hommage à Edith Piaf donc j’ai épluché toute sa discographie et j’ai trouvé cette chanson là qui était moins connue, qui musicalement me plaisait pas mal et surtout dans sa thématique elle parlait encore une fois d’homme salaud et de femme victime qui est un thème récurent chez moi. C’est un peu la même chose que « I Want You » sur mon premier album qui raconte la même chose du point de vue de l’homme. C’était donc une bonne réponse et musicalement elle était assez ouverte pour être explosée… Dans l’original tout est dit très fort ! enfin c’est du Piaf quoi, les clous sont bien enfoncés aux bons endroits mais il y a un moyen de faire sauter toute la décoration pour n’avoir plus qu’un squelette. Et elle continue à marcher en devenant un peu trouble. Je tenais à jouer sur l’ambiguïté musicale de cette chanson en cassant les murs à l’intérieur.»

La variété des Carpentier avec Cloclo comme Radiohead sont ils disponibles au même niveau dans ta discothèque ?
Albin de la Simone : « Alors Radiohead oui il y a tout. La variété des Carpentier pas trop. Moi ça s’arrête avec Léo Ferret et ça recommence avec Souchon. J’ai pas vraiment du Sylvie Vartan par exemple. Berger et France Gall aussi… je n’aime vraiment pas Claude François, cela ne me fait vraiment rien du tout. Je ne le trouve pas tripant du tout, froid comme un glaçon, c’est quelqu’un qui m’agresse.»

Quel est le jeu démoniaque sur ton ordinateur qui pourrait te faire quitter tes chansons ?
Albin de la Simone : «La chanson parle plus d’érotisme sur ordinateur que de jeu en lui même. L’interface d’un jeu comme Lara Croft je trouve ça complètement dingue. Manipuler une nana qui a le cul en arrière, qui nous montre ses fesses, qui fait des acrobaties pas possible alors que c’est nous qui la faisons aller à droite, à gauche, devant, derrière… cela vient de là, de manière à parler du jeu érotique. Bien que chez moi ce serait une Lara-Croft en string et fouet.»

Il faudrait penser à réaliser ce jeu qui pourrait intéresser beaucoup de monde ?
Albin de la Simone : « J’en ai bien peur (rire).»

Sur ton site Internet tu as ton alter ego qui est Simone, as tu vu le film avec Al Pacino et la manière dont la créature devient plus importante que son créateur ?
Albin de la Simone : «J’y suis allé en courant, non pas parce que le film porte le nom de ma marraine mais car c’est le gars qui avait réalisé «Bienvenue à Gattaca» et j’ai détesté Simone. J’ai vraiment été déçu. C’est une merde ce film. Ma Simone à moi est tout l’inverse de cette fille si nickel. Elle a des tentacules, elle a 7 fesses, elle a des nodules, bref elle est riche et complexe alors que la Simone du film c’est une espèce de clou synthétique pas du tout humaine. La mienne est plus mortelle alors qu’elle a des organes qui viennent de partout. Elle est plus compliquée. Je l’aime, je la déteste. Elle me nourrit elle me tue. C’est plus un rapport humain normal.»

Est ce que ta marraine est la même que celle de Nicolas Sarkozy ?
Albin de la Simone : « Ce serait bien que Simone ait un petit côté Bernadette Chirac. Enfin non ce serait triste quand même (rire).»

Sur cette dernière piste t’es tu fait un plaisir de vieux jazzman ?
Albin de la Simone : « Un plaisir d’improvisateur. J’aime faire ça. Cela pouvait être drôle de proposer moi-même une ambiance de sortie d’album. A la manière de la musique qui remonte dans les salles de cinéma ou après un concert. Je ne voulais pas mettre un titre d’Albin de la Simone chanteur mais en tant que musicien créer la musique qui serait à mon sens plaisante pour quitter l’album. J’ai fait une improvisation de 20 minutes qui n’a aucune prétention. Cela ne se veut pas du tout évoquer une musique intéressante en elle-même, ce n’est pas du jazz, c’est une espèce de divagation pénarde et agréable… j’espère. »

Le plus dur dans un disque n’est il pas d’en écrire les remerciements ?
Albin de la Simone : «C’est vrai que c’est compliqué ! Sur celui là… oui oui c’est chiant ! cela me préoccupe des mois à l’avance. Tu n’as pas envie de louper quelqu’un. C’est une tradition alors je le fais. Je me prends bien la tête pour choisir qui comment, dans quel ordre… Mais tu sais je dépends vraiment des autres. Bien sur je suis le personnage central et que je suis Le chanteur et merde (rire) mais je découle de plein de gens qui me filent des coups de main, qui me permettent certaines choses. Il y a des remerciements qui me paraissent incongrus mais ce sont des gens qui m’ont donné quelque chose afin que mon disque existe. J’ai envie de remercier aussi bien le musicien de mon disque que ma copine Malka Braun qui est venu me maquiller gratuitement sur la pochette surtout que je l’avais oublié sur le premier album et dieu sait que le maquillage était important. J’ai toujours la trouille de ne pas rendre à Cesare ce qui appartient… C’est dans ma nature et dans mon éducation. Je suis exagérément remerciant (rire).»

Pierre DERENSY