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Hubert Félix Thiefaine
 

par Pierre Derensy (27/11/05)

 
Extrait en musique

 

 
Article par I-Muzzik

 

Il y en a tant, qui avec l’âge deviennent des croulants utilisant la redondance de leur machinerie pour faire un énième disque pépère, que l’on serait idiot de ne pas écouter les confessions sentimentales d’un never-been qui s’appelle Hubert Felix Thiefaine. Ouvrant son univers à de jeunes compositeurs de la chanson française (Mickey 3D, J.P. Nataf, Cali…), « Scandale Mélancolique » est le 14e album du jurassien sur qui Ferré disait « Hubert Félix déborde de tendresse, il parle, il chante et donne au verbe une pathétique présence.»

Avez vous beaucoup pleuré parce que des trains s’en allaient ?
Hubert Félix Thiefaine : «(rire) non pas vraiment… quand les trains partent je suis plutôt très joyeux. Cela me permet d’en voir arriver de nouveaux.»

C’est un album de belles collaborations, ce rendez vous avec des artistes de la nouvelle génération vient-il de votre disque de reprise par ces mêmes artistes ou alors était ce un besoin d’avoir du monde autour de vous après votre tournée solo ?
Hubert Félix Thiefaine : «L’idée de prendre un compositeur plutôt que de composer moi-même m’est venue quand je faisais l’album précédent car je pense qu’à chaque album il faut inventer les outils pour le faire. C’était une façon de casser mes habitudes. Ne pas faire mes musiques moi-même et de faire rentrer des gens dans mon univers. A l’époque je ne savais pas qui ! je ne savais pas si cela serait une personne ou plusieurs. Peu à peu il y a eu de belles rencontres avec cette nouvelle génération, cet album de reprise « Les Fils du Coupeur de Joint » aussi a beaucoup compté… Sur les festivals que je faisais, je rencontrais de plus en plus d’ artistes qui avaient l’air d’avoir du plaisir à me rencontrer… tout cela fait que j’ai décidé d’embarquer cette jeunesse dans mon histoire… plutôt que l’ancienne qui m’ignorait complètement (rire). »

Alors comment s’est déroulé le fait de faire un duo avec Cali sur « Gynécées » par exemple ?
Hubert Félix Thiefaine : «Cali je l’ai rencontré sur un festival. Je lui ai dit que j’avais une proposition malhonnête à lui faire et que je lui en parlerais quand tous les deux nous ne serions plus en tournée. 2 mois après je lui ai envoyé le texte et lui me l’a renvoyé avec une maquette presque par retour de courrier. Ce n’était pas prévu de faire un duo mais j’ai gardé sa voix car je la trouvais très belle, elle collait très bien sur le titre.»

C’est aussi un album de changement, vous sentiez que c’était le moment ou jamais ?
Hubert Félix Thiefaine : «Je ne peux pas vous le dire. Quand je me mets au travail j’oublie les autres, j’oublie tout. Je ne pense qu’à mes textes, mes chansons. Quand j’écris une chanson c’est toujours parce qu’elle n’existe pas et que j’aimerais l’entendre. Je n’ai pas le temps d’avoir d’autres préoccupations. Je pense au public après le mastering.»

Le visuel de l’album exprime un peu cet Hubert Felix Thiefaine emprisonné dans le grillage d’une image qu’on voudrait lui imposer ?
Hubert Félix Thiefaine : «Faudrait demander à Laurent Seroussi qui a fait le concept de la pochette. L’idée à l’origine était la rencontre du scandale et de la mélancolie. L’un est un mot plutôt dur et extraverti alors que l’autre est beaucoup plus tendre. Au début nous pensions à un couple qui ferait l’amour emprisonné dans du grillage qui était à la fois une forme tendre et dur mélangé et puis on en est arrivé à garder le côté grillage, le côté concentrationnaire de cet objet et le côté tendre avec la biche ou les souris à l’intérieur du chat.»

Une jeune femme vient vous prêter main forte sur « Last Exit To Paradise », qui est une chanson absolument rock n’roll ?
Hubert Félix Thiefaine : «Elle s’appelle Angèle David Guillou, c’est une chanteuse qui vit à Londres, qui prépare un album solo et qui joue aussi sous le nom de Klima. Elle chante super bien et est super jeune. Vous voulez savoir si elle est libre ? (rire)»

Vos textes sont d’ailleurs en harmonie avec la rage de cette musique rock ?
Hubert Félix Thiefaine : «C’est Philippe Paradis qui vient me prêter main forte sur la musique de cette chanson. Il était guitariste sur ma précédente tournée. Je voulais faire quelque chose avec lui. J’ai tout de suite pensé à lui proposer «Libido Moriendi», j’ai adoré le résultat donc je lui ai demandé de continuer d’écrire sur l’album et de fil en aiguilles je l’ai imposé à la maison de disques pour qu’il réalise ce patchwork, enfin plutôt ce qui aurait pu être un patchwork si nous n’avions pas veillé à garder cette unité, ce son qui est un peu le mien.»

La venue d’Elista aussi doit avoir joué dans ce sens ?
Hubert Félix Thiefaine : «Ce sont des jeunes de 19,20 piges complètement déjantés que j’adore qui ont placé la mélodie sur « Télégramme 2003»

Ce renouvellement c’est aussi une manière de vous foutre un coup de pied aux fesses ?
Hubert Félix Thiefaine : « Non ! je n’ai jamais eu besoin d’avoir des coups de pied au cul. J’avance normalement, je suis quelqu’un d’assez sérieux dans mon travail et régulier aussi. Travailleur parce qu’en temps que fils de prolo j’ai vu mes parents travailler toute leur vie et c’est vrai que j’ai pris l’habitude d’enchaîner beaucoup de choses, sans compter tout le travail que je fais et qui n’est pas publique.»

Je voulais aussi évoquer «When Maurice meet Alice» qui est dédiée à la mémoire de vos parents ?
Hubert Félix Thiefaine : «Les idées tombent toutes seules. Je ne sais pas, j’écris beaucoup. Il y a des choses qui tombent à certaines heures et qui s’alignent toutes seules. Le plus dur c’est quand on est resté un certain temps sans écrire et qu’il faut s’y remettre. Je peux passer 3 mois sur une chanson, «Scandale Mélancolique» j’ai du en faire 35 versions avant d’en être satisfait.»

La machine HFT est un diesel ?
Hubert Félix Thiefaine : «Une fois que la machine est en route tout tombe tout seul ! je ne peux pas vous dire comment est tombé «When Maurice Meet Alice» le titre il y a longtemps qu’il était dans mes bagages. Cela sonne tellement bien que je l’avais depuis 15 ans.»

Le clown triste est il devenu enfin heureux avec l’âge ?
Hubert Félix Thiefaine : «Je ne crois pas au bonheur. C’est comme l’amour ce ne sont pas des choses qui me touchent.»

Dans la société aseptisée, par le gouvernement rigide qui nous demande d’être sage et docile, peut on encore être rebelle en 2005 ?
Hubert Félix Thiefaine : «J’en sais rien. Moi je n’ai jamais voulu être un rebelle. Je revendique qui je suis. Moi je vis ma vie. On peut me mettre toutes les étiquettes que l’on souhaite je m’en fous. J’ai décidé de vivre à ma manière. Je l’ai décidé dès 12 ans ! je ne peux dire qu’une chose : c’est que je vis un rêve de gosse. Si on ne croit pas à ses rêves de gosses autant se flinguer tout de suite. Quand je vois des mecs d’un certain âge qui ont la nostalgie de leur 20 ans, de leur armée qui a du être une période la plus chiante de leur vie : c’est grave !»

Je voudrais revenir sur le chanteur engagé : vous avez donné un concert pour aider les gens qui dénoncent les bombes à sous-munitions pour Handicap International ?
Hubert Félix Thiefaine : «Il y a d’autres choses que je soutiens mais ils m’ont proposé de venir faire un concert et je trouve ça tellement scandaleux… surtout fabriqué dans nos pays, que cela fait morfler des mômes pendant des années même après les conflits.»

Pensez vous que ce qui arrive ces jours ci dans les banlieues est une réaction obligatoire à la répression de plus en plus forte ainsi qu’à la misère sociale qui prend des proportions folles ?
Hubert Félix Thiefaine : «C’était prévisible. Partout où il y a des ghettos ! ce qui se passe aujourd’hui c’est passé aux USA il y a 10 ans à Watts en Californie. Les américains nous avaient prévenu vu notre façon de concevoir les villes que cela allait pêter un jour. Comme en France on se fout de tout surtout quand ça vient de l’étranger, c’est clair que ce n’est qu’un début.»

Mai 68 finalement à côté c’étaient des revendications beaucoup moins tragiques que celles d’aujourd’hui ?
Hubert Félix Thiefaine : « Ce n’était qu’une histoire de fantaisistes. Des petits fils de bourgeois qui demandaient la télévision en couleur. Aujourd’hui c’est beaucoup plus compliqué, ce n’est pas seulement économique.»

Pour la promo de ce nouvel opus vous faites même l’effort de faire quelques apparitions télévisuelles notamment à Taratata et Top of The Pop, on nous aurait changé notre Hubert ?
Hubert Félix Thiefaine : «Depuis 20 ans j’ai été censuré de façon sournoise. Moi je suis toujours le même. J’ai toujours accepté de passer à toutes les émissions auxquelles on m’invitait. Maintenant que je passe plus en 10 jours à la télévision qu’en 20 ans ce n’est pas mon problème c’est celui des médias. Ce qui est scandaleux c’est que j’ai pu faire Bercy sans qu’aucun média ne vienne.»

Il y a aussi « Jour d’Orage » votre nouvelle biographie, qu’est ce que cela fait d’être le sujet d’un livre ?
Hubert Félix Thiefaine : «C’est emmerdant, c’est comme une sorte de viol.»

Pierre DERENSY