Voilà un disque qui risque de faire l’unanimité. Et un disque qui fait l’unanimité c’est jamais bien bon, toujours un peu suspect. Alors, on a écouté attentivement « Talkie walkie » à la recherche de la moindre faille, du plus petit défaut afin de tomber sur le duo avec une certaine mauvaise fois pour se démarquer des louanges de rigueur. Déception ou pas, il n’y a pas de défaut sur ce troisième véritable album d’Air. « Talkie walkie » est avant tout un disque posé, calme où chaque morceau semble travaillé à l’infini pour ne laisser transpirer que leur vision songeuse de la perfection (« Venus », « Biological »). Moins ambitieux et riche, ce disque fait preuve, à coté du déjà mémorable « 10000 Hz legend » d’une grande sobriété, ce qui ne le rend pas moins exceptionnel, bien au contraire. Ici, les mélodies ne pourront pas se cacher derrière un attirail parfois artificiel (« Cherry blossom girl »). D’où cette conclusion devenue évidente : en plus d’être des superbes bidouilleurs inventifs, ils sont aussi des compositeurs hors pair. De toute façon, le duo a pour la première fois moins d’emprise sur le son de son oeuvre. En faisant appel à Nigel Godrich, Air délègue et s’envole. S’envole vers une musique plus pop, plus classique dans ses contours. Air écrit et joue dans un schéma qui s’inscrit en continuité d’une histoire et non en brisure de ligne. Une continuité de l’histoire classique de la musique pop, folk tout autant qu’électronique (« Surfin on a rocker »), qui les pousse à devenir sur « Talkie Walkie » interprètes (si on peut dire ainsi) autant que musicien ou auteur et plus que producteur. En fait « Talkie walkie » est, en plus d’être un grand disque aux multiples perspectives, un disque tournant, un passage obligé entre le Air fringant des débuts, celui expérimentateur, ambitieux et décomplexé, à un Air plus sobre, plus mature qui ne réinvente peut-être plus la musique à chaque morceau mais qui la rend encore plus proche de notre intimité. Pour cela et pour le reste aussi, « Talkie walkie » restera peut-être comme notre album préféré du duo à défaut d’être le meilleur. |