Variation sur variation de Gainsbourg : ça s’appellerait « Variation sur Richard Hawley » : « Hawley tel Alice, se glisse de l’autre côté du miroir ». Le destin de Richard Hawley est lié à Sheffield, ville industrielle du Nord de l’Angleterre. Pas vraiment de quoi rêver. Mais le dernier grand crooner rock a créé une faille spatio-temporelle dans son environnement. Il restitue un monde nostalgique d’un certain âge d’or rock en total décalage avec la réalité. Il rêve et s’invente par le biais de cette fiction : dans la lignée des champions magnifiques de la ballade brise cœur. Elvis, bien sûr (on imagine bien Hawley reprendre « I can’t help falling in love with you »), et surtout Roy Orbison. Costard d’époque, banane, lunettes noires : tout ici est décalé. Et en même temps pas tant que ça. Hawley arrive à faire sonner tout ça de façon tellement moderne, et il est tellement bon dans le registre qu’on en perd soi-même ses repères. Et l’auditeur à son tour traverse le miroir,… Quelle voix ! Quel son! « Truelove’s gutter » a la particularité d’être plus intimiste et moins lyrique que ses prédécesseurs. Les morceaux sont plus étirés, plus atmosphériques. La guitare est toujours aussi extra mais plus discrète, les tapis de cordes sont plus présents tout en restant très éloignés de l’emphase symphonique. La forme évolue un peu mais le fond est le même : romantisme, solitude, nostalgie. On tient là un album crépusculaire, voire nocturne. Entre joie et tristesse, le cœur balance. En équilibre instable, tiraillé entre la lumière et l’obscurité, dans ce clair-obscur musical merveilleux, on le sent monter infailliblement, ce petit titillement familier : le plaisir. |